Peut-on travailler dans la Recherche Clinique sans formation spécifique ?
Quelques éléments de réponses avec notre entretien
Peux-tu nous décrire ton parcours universitaire et professionnel ?
Dès le début de mon parcours universitaire, je me suis attachée à essayer de comprendre la complexité du vivant au travers de différentes disciplines. Ainsi, après une licence puis une maitrise de biochimie, je me suis spécialisée en immunologie et virologie. J’ai décidé de réaliser ces 2 spécialités, car il était important pour moi de comprendre comment le pathogène et le système immunitaire s’impactent mutuellement. J’ai ensuite réalisé une thèse sur le VIH puis, puis trois post-doctorats successifs. En 2017, j’ai entamé une réflexion sur mon futur parcours professionnel, et c’est lors de cette réflexion que j’ai rencontré un MSL (Medical Science Liaison) qui m’a conseillée de prendre une mission temporaire pour que je puisse découvrir ce métier. J’ai alors postulé et j’ai obtenu un CDD de MSL de 6 mois pendant lequel j’ai confirmé que ce métier me plaisait puis j’ai intégré Vifor Pharma en tant que MSL, poste que j’ai conservé pendant 2 ans, avant d’être promue responsable de formation (scientifique et réglementaire).
Quel est ton parcours pro et quel poste occupes-tu actuellement ?
Depuis janvier 2022, je suis Directeur Scientifique Néphrologie. C’est un poste très challengeant où l’on est constamment en interaction avec des interlocuteurs issus de différents domaines scientifiques (médecins, responsable règlementaires, statisticiens, MSL, etc.). J’accompagne les médecins sur les médicaments de ma société afin d’obtenir un maximum de données sur nos produits en post-commercialisation avec des enquêtes pratiques entre autres. Je m’appuie sur ma connaissance du produit, de l’environnement, des statistiques et ma capacité à collaborer et à interagir avec des professionnels de différents métiers et environnements. Nous réalisons également des lancements de produits, et j’interviens dans la formation des collaborateurs dont les MSL.
Lors de ta recherche d’emploi, as-tu facilement eu accès aux informations concernant la RC ? Quelle aide supplémentaire aurais-tu souhaité avoir ? (site internet, mentor, source d’info etc.)
Quand je me suis engagée dans la thèse, je pensais me consacrer uniquement à une carrière dans la recherche académique, je ne voyais pas d’autres options possibles. C’est pour cela que je n’avais jamais recherché d’informations sur d’autres métiers. Ce n’est qu’à l’issue de mon troisième post-doctorat en 2016, que j’ai entamé une réelle réflexion sur la poursuite de ma carrière en recherche académique. Même si cette réflexion a été complexe et douloureuse j’ai alors exploré le parcours des personnes de mon entourage, pour savoir ce qu’ils étaient devenus ce qui m’a permis d’avoir une première vision des métiers possibles à l’issue d’une thèse en sciences. Mais ce qui a vraiment été l’élément déclencheur, est le bilan professionnel que j’ai réalisé avec le service de développement des carrières de l’Institut Pasteur, la MAASCC (Mission Accueil, Accompagnement et Suivi des carrières des chercheurs). La recherche malmène les chercheurs et faire cette pause de réflexion en travaillant avec des personnes capables de comprendre ma situation et en rencontrant des professionnels fut réellement stimulant. J’ai repris confiance en moi et en mes compétences.
Quelles compétences initiales clés (opérationnelles et/ ou personnelles) t’ont permis d’intégrer la RC ?
J’ai pu intégrer mon premier poste en mettant en avant mes compétences scientifiques. En tant que chercheur, j’ai non seulement valorisé mon expertise mais aussi mes capacités à savoir lire et analyser des articles, comprendre et réaliser des statistiques, organiser et préparer une présentation, comprendre la mise en place des essais cliniques et le mécanisme d’action des médicaments grâce à mes connaissances biologiques. Je me suis aussi appuyée au quotidien sur ma capacité à aller chercher de l’information, à remettre l’étude ou le médicament dans son contexte ainsi que sur ma capacité à rédiger des articles et répondre aux reviewers. Les savoir-être sont également importants : rigueur, esprit critique, honnêteté, éthique, gestion du stress. J’ai également été évaluée par une mise en situation de présentation orale.
Plutôt de nature timide, j’avais conscience que cela pourrait vite devenir un frein pour ma carrière professionnelle, surtout dans un poste tel que MSL qui nécessite d’être en constante interaction avec différents interlocuteurs. J’ai donc fait appel à un coach, pour me permettre d’améliorer ma diction, ma présentation, et surtout pour prendre confiance en moi notamment lors des prises de paroles en public. Ce coaching a été d’une grande aide pour moi et a été un atout non négligeable lors de ma recherche d’emploi.
En tant que scientifique qui vient du monde de la recherche scientifique et médicale, on a toutes les ressources pour intégrer la recherche clinique sans formation particulière.
A la suite de ton intégration, as-tu suivi une formation interne ?
J’ai été formée à chaque prise de poste. Pour mon premier contrat de 6 mois en tant que MSL, j’ai bénéficié de 1 mois de formation réglementaire. Chez Vifor Pharma, tous les MSL bénéficient d’une période de formations scientifiques et règlementaires internes obligatoires. En interne, les MSL bénéficient de formations en e-learning complétées par un training avec le manager.
Quelles ont été les évolutions de ton poste et quels sont tes souhaits d’évolution (rester en RC ou non ? ). Penses-tu que l’absence de formation initiale en RC soit pénalisante pour ton futur parcours professionnel ?
Mon évolution professionnelle a su suivre mes besoins. Je viens d’intégrer ce poste où je me retrouve en adéquation avec mon ADN scientifique et où je participe à l’amélioration de la prise en charge des patients. Je m’y retrouve humainement, éthiquement et scientifiquement. On verra ce que l’avenir me réserve !
De quoi es-tu la plus fière dans ton parcours et quel conseil donnerais-tu aux personnes voulant intégrer la RC ?
Je suis fière de mon parcours sans lequel je n’aurais pas cette approche de mon métier. Le changement d’orientation a été difficile et je suis fière d’avoir rebondi, je me sens équilibrée aujourd’hui et c’est pour moi, l’objectif d’une vie. Aujourd’hui je me lève le matin, j’ai la « niaque », j’aime ce que je fais.
Il est important d’être ouvert à prendre une mission courte, ce fut clé dans mon parcours. J’ai pu y découvrir le métier et tester s’il me convenait. En tant que scientifique qui vient du monde de la recherche scientifique et médicale, on a toutes les ressources pour intégrer la recherche clinique sans formation particulière. Je conseillerais de se faire accompagner et coacher sur son image et la façon dont on se présente. A l’issue d’une expérience de recherche académique et en réorientation, on ne dégage pas que du positif et les laboratoires pharmaceutiques recherchent quelqu’un qui va les représenter, construire une relation de confiance sur le long terme, l’image d’un soi « bien dans sa peau » est donc clé. On peut toujours rebondir et avoir plusieurs vies !
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